Faits de brindilles, de cailloux et autres branchages, les hôtels à insectes accueillent les insectes dans les jardins publics ou privés. Mais ces produits parfois vendus tout faits en jardinerie sont-ils vraiment conseillés pour favoriser la biodiversité ? Éléments de réponse avec des spécialistes.
On en voit de plus en plus dans les jardins publics ou les rayons des magasins de jardinage. Les hôtels à insectes, ces petites maisons remplies de bouts de bois creux ou troués, d’écorces ou de brindilles, sont censés offrir un refuge aux insectes qui désertent les pelouses tondues. Sont-ils vraiment efficaces pour relancer la biodiversité des espaces naturels ?
« Ça fait partie des fausses bonnes idées aujourd’hui, tranche Aurélien Daloz, chef adjoint du service Usages et gestion de la biodiversité à l’Office français de la biodiversité (OFB). On s’aperçoit que ça concentre les maladies, les parasites et les virus. Ça profite aussi à une espèce envahissante, l’abeille Megachile sculpturalis. » Pour éviter l’installation de cette dernière dans un hôtel à insectes, le diamètre des trous dans le bois ne doit pas être supérieur à 6 mm de diamètre.
Un « piège à insectes »
Certains usages des hôtels à insectes sont mêmes considérés comme néfastes, notamment quand ils deviennent des garde-manger pour les prédateurs qui se postent devant pour dévorer les animaux hébergés à l’intérieur. Il peut ainsi être intéressant de les déplacer chaque année pour éviter ce cas de figure.
En ville, les hôtels à insectes sont parfois placés de manière inadéquate, reflétant un manque de connaissance du sujet. « Près de chez moi, il y a un hôtel à insectes sur un rond-point, c’est une catastrophe », raconte Freddie-Jeanne Richard, enseignante-chercheuse à l’Université de Poitiers, spécialiste des insectes. « Pour y aller, les insectes doivent déjà échapper aux voitures. Ensuite, quand les œufs éclosent et que l’insecte émerge, il ne sait pas bien voler les premières minutes, c’est encore un bébé. Et là, il n’y a rien autour de lui sauf des voitures qui vont le taper. C’est presque plus des pièges à insectes », déplore-t-elle.
Chambres d’hôtes
Seul aspect positif de ce dispositif, selon Mathieu de Florès, chargé de mission sciences participatives à Office pour les insectes et leur environnement (Opie), c’est sa puissance pédagogique, qui permet aux amateurs de tous les âges d’observer les insectes et de prendre conscience de leur présence. Mais « les insectes n’ont pas besoin de ces hôtels pour vivre », insiste-t-il.
Lui conseille de fabriquer soi-même un hôtel à insectes, avec des matériaux de récupération. Il déconseille les « hôtels vendus dans le commerce »,qui « ne sont pas adaptés : ils sont trop petits, la longueur des tiges n’est souvent pas idéale ».
Plutôt qu’un hôtel, Aurélien Daloz conseille d’installer « des chambres d’hôtes » pour les insectes : « C’est facile et pas cher de favoriser la biodiversité dans son jardin. Par exemple, en faisant des tas de bois, de branches mortes, des ronces, un amas de pierre. »
Espace tondu, espace mort
Tout cela, en privilégiant évidemment les essences locales. Car ce qui marche encore mieux qu’un hôtel à insectes pour la biodiversité dans le jardin, c’est d’adopter de nouvelles habitudes. « Si vous avez un jardin tondu chaque semaine, avec des haies de thuyas, tout ça ne sert à rien », commente Mathieu de Florès. « Un espace très tondu qualifié de propre, c’est plutôt un espace sans vie », appuie Aurélien Daloz.
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La solution, c’est de favoriser les microhabitats. « On multiplie les habitats non fauchés, non tondus. Ce qui compte c’est d’avoir une mosaïque de milieux. Si vous voulez une haie, favorisez la plantation de haies bocagères », conseille Mathieu de Florès.
« Il faut voir le jardin comme un espace qu’on emprunte. On n’est pas les seuls, il y aura d’autres personnes après. Il faut que cet espace emprunté à la nature reste naturel », insiste Mathieu de Florès.
Un indice pour savoir si son jardin est un havre de biodiversité ? On y voit passer de plus en plus d’espèces, dont certaines que l’on n’avait jamais vues. « Dans un jardin bien géré, il va y avoir plein d’espèces différentes d’abeilles, plein de papillons », décrit Freddie-Jeanne Richard. Au fil des saisons et des années, peut-être alors verrez-vous réapparaître ces insectes qui ont presque disparu de nos jardins, comme la Rosalie des Alpes, très présente en Loire-Atlantique ou le lucane cerf-volant.
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